Les clôtures font parfois plus que délimiter les terrains. Il n’est pas rare que ces barrières soient à l’origine de différends entre voisins, différends qui peuvent même se transformer en véritables chicanes. Comment éviter que la construction d’une clôture dégénère en guerre ouverte avec votre entourage? C’est bien simple. Il suffit de suivre quelques étapes à cet effet?
Les étapes à suivre pour un projet sans soucis
- Consultez d’abord et avant tout la municipalité pour connaître la réglementation locale. Ce sont en effet les municipalités qui régissent l’installation de clôtures ou de haies d’arbustes délimitant les terrains privés ainsi que leur étendue et leur localisation en fonction des voies urbaines et des équipements municipaux tels les bornes-fontaines, les panneaux de signalisation, etc. Elles déterminent aussi les hauteurs permises et les matériaux qui sont autorisés ou interdits.
- Jetez un oeil au certificat de localisation de votre propriété afin de vérifier si une ou des servitudes l’affectent (par exemple : un droit de passage).
- À la lumière de ces informations, définissez le modèle de clôture qui convient le mieux à vos goûts et vos besoins et qui correspond au style de votre maison.
- Informez les voisins concernés de la nature de votre projet et de ses caractéristiques. S’il y a lieu, révisez le projet à la lumière de leurs commentaires.
- Proposez le recours à un piquetage aux voisins concernés. S’ils saisissent le bien-fondé de la démarche, ils pourraient accepter d’en partager le coût. Dans le cas contraire, vous devrez l’assumer seul.
- Procurez-vous le permis requis auprès de votre municipalité.
- Commandez la clôture ou construisez-la!
Piquetage : pour repérer la ligne et les empiètements
L’unique façon d’éviter tout problème est de construire la clôture sur la ligne séparatrice, c’est-à-dire à la limite des terrains. La meilleure garantie du bon emplacement de la clôture consiste à effectuer un piquetage par l’entremise d’un arpenteur-géomètre.
Le piquetage permet de marquer une ligne de propriété au moyen de repères. Il constitue une opinion de l’arpenteur-géomètre découlant de son analyse du plan cadastral, des titres de propriété et de l’occupation des lieux. L’exercice n’est valable que pour le seul bénéfice de la personne qui a demandé le piquetage. Il n’a pas la même valeur légale que le bornage qui établit la limite entre deux propriétés de façon irrévocable et permanente et dont le procès-verbal doit être inscrit au registre foncier. Dans le langage populaire, on confond très souvent l’opération de piquetage avec celle du bornage. On demande aux arpenteurs-géomètres de « poser des bornes », mais c’est en fait un piquetage qui est nécessaire. Le piquetage permet la pose de repères « officiels » identifiés au nom de l’arpenteur-géomètre. S’il n’y a pas de litige avec les voisins, le piquetage est l’opération adéquate et les coûts associés au piquetage sont beaucoup plus faibles que ceux d’une opération de bornage.
Le coût d’un piquetage en milieu urbain s’élève à un peu plus de 1 000 $. Cette somme comprend la production d’un rapport, le cas échéant, et d’un plan (certificat de piquetage).
Si l’opération révèle un ou des problèmes d’occupation, comme un empiètement attribuable à une entrée asphaltée excédant la limite d’un terrain, le professionnel s’abstiendra de poser des repères afin d’éviter l’éventuelle frustration du propriétaire du ou des terrains en cause. Un rapport composé d’un plan et d’un texte sera tout de même produit. En pareil cas, des frais d’enquête (généralement facturés à taux horaire) s’ajoutent.
Un tel problème peut engendrer deux réactions. Les parties peuvent convenir d’un correctif ou d’un arrangement et un règlement à l’amiable est obtenu. À défaut d’un tel dénouement heureux, une mise en demeure doit être envoyée au voisin en cause. Cette démarche peut ultimement aboutir à l’imposition d’un bornage judiciaire, un exercice coûteux et susceptible d’entraîner de longs délais.
Implantation de la clôture
Vous pouvez choisir de construire une clôture sur la ligne séparatrice du terrain ou entièrement sur votre propre terrain. Dans un cas comme dans l’autre, la clôture doit respecter les normes établies par votre municipalité.
Si vous optez pour une implantation sur la ligne séparatrice, vous et votre voisin serez propriétaires à parts égales de la clôture et vous devrez partager les frais de construction, d’installation et d’entretien.
Vous devez toutefois vous entendre avec le voisin sur le type de clôture et ses caractéristiques avant d’en entreprendre la construction et lui réclamer la moitié des coûts. À défaut d’une entente, vous devrez vous adresser à la cour pour obtenir une ordonnance à cet effet.
Si vous préférez installer entièrement la clôture de votre côté de la ligne séparatrice, cette clôture vous appartiendra à part entière et vous devrez en assumer la totalité des coûts et l’entretien.
N’allez toutefois pas croire que cette décision vous placera à l’abri de tout! En fait, elle ouvre la porte à un éventuel recours d’un voisin pour prescription acquisitive, comme prévu à l’article 2875 du Code civil du Québec. Un recours à ce titre peut permettre à un voisin qui, depuis au moins 10 ans, occupe une parcelle de votre terrain située de son côté de la clôture et s’y comporte comme s’il en était le propriétaire d’en réclamer la propriété devant les tribunaux. Aussi est-il conseillé au propriétaire d’une clôture érigée sur son propre terrain de s’assurer que son droit de propriété sera protégé en consultant un notaire.
Le même conseil s’applique à un propriétaire qui apprend que la clôture le séparant d’un voisin empiète sur son propre terrain. On aurait tort de penser être protégé de tout par une entente écrite signée par les deux parties et stipulant que la clôture existante sera tolérée jusqu’à son remplacement, mais que la prochaine devra respecter la ligne séparatrice. Il n’est pas rare que de tels documents soient égarés au fil du temps, notamment si la maison change de mains à plusieurs reprises. Sachez que seule une servitude d’empiètement temporaire dûment notariée peut légalement permettre de dormir en paix.
De plus, on comprendra que la reconstruction d’une clôture à l’endroit même où s’élevait la précédente, sans autre vérification de la limite de propriété, ne peut rien garantir si ce n’est la reconduction d’un possible problème d’occupation existant.
Gardez bien en tête que l’expression « chicane de clôture » n’est pas devenue populaire sans raison. Aussi, ne devez-vous pas hésiter à vous tourner vers un arpenteur-géomètre ou un notaire si vous songez à acheter une clôture… et surtout la paix!
SOURCE : CAA Québec